Un tour de force. Au fil du dépouillement samedi soir en Polynésie, l’écart se resserre entre Nicole Bouteau, ancienne ministre du Tourisme investie par Ensemble ! et membre de la majorité locale du président polynésien Édouard Fritch, et Tematai Le Gayic, étu- diant de 21 ans, candidat indépen- dantiste soutenu par la Nupes. Pour sa première élection, sa qualifica- tion au second tour était déjà un exploit, mais sa victoire est histo- rique et entérine le succès des indé- pendantistes polynésiens lors de ce scrutin.
À 21 ans, ce double diplômé d’Histoire et de Sciences politiques bat le record jusqu’ici détenu par Marion Maréchal Le Pen, élue en 2012 à 22 ans.
«On veut changer le rapport qu »on a à la France. Au lieu d »un rapport de subordination, on veut un rapport de coopération», expliquait le jeune député indépendantiste en cam- pagne électorale, durant laquelle il a défendu la création d’une citoyen- neté polynésienne pour protéger l’emploi local ou le foncier.
«Nous avons une histoire, des langues, des cultures, des coutumes. Aujourd’hui, on parle de rendre offi- ciel les langues ma’ohi. Pourquoi ça ne marche pas ? Parce que dans la Constitution française, on ne recon- naît qu’un seul peuple, le peuple français, et on ne reconnaît qu’une seule langue, la langue française. Dès lors que le peuple Ma’ohi sera reconnu en tant que peuple, on pourra rendre officiel les langues ma’ohi sur ce territoire».
Sur l’engagement de la jeunesse polynésienne en politique, le nou- veau député reconnaît «un manque de confiance de la part des jeunes ».«Beaucoup ne vont pas voter parce qu’ils ne voient plus l’importance de la politique. (…) Moi je suis jeune, et ce que je leur dis, c’est que ‘si vous ne vous intéressez pas à la politique, ne vous en faîtes pas, car la politique va s’intéresser à vous’. Donc il faut cet engagement». Natif de Papeete, Tematai Le Gayic a grandi à Tubuai, une île de l’archipel des Australes, puis à Tahiti. Il a obtenu une double licence en sciences politiques et en histoire à l’université Paris-VIII, avant d’intégrer un master de recherches en sciences politiques à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), suspendu pour mener campagne en Polynésie.
Lors de ses études, il a présidé l’Association des étudiants de Polynésie française (AEPF) puis la Fédération des associations des étu- diants de Polynésie française (FAEPF). Il a plusieurs fois été primé lors de concours de déclamation et de danse tahitienne. Il a également dirigé un groupe de chant tradition- nel. Il siégera au Palais Bourbon dans les rangs de la Nupes, avec ses collègues indépendantistes Steve Chailloux, anthropologue et profes- seur de tahitien à l’Université de Hawaii et Moetai Brotherson, infor- maticien et député sortant.
Pour rappel, c’est la première fois que le parti indépendantiste Tavini huira’atira parvient à faire élire plus d’un député, et la première fois qu’il remporte une élection sans alliance. A un an des élections territoriales, le scrutin le plus important en Polynésie française, c’est aussi un avertissement au parti majoritaire et au gouvernement d’Édouard Fritch, mis en difficulté par la crise économique consécutive à l’épidé- mie de Covid-19.Source : Outre-mer 360 – Jean- Tenahe Faatau