Jenny Hyppocrate en croisade contre la drépanocytose

Pouvez-vous nous éclairer sur l’objet de votre visite en Guadeloupe ?
Nous sommes là, juste pour sensibiliser et informer tout un chacun sur la maladie de la drépanocytose. Souvent, je me dis qu’un homme averti en vaut, pas seulement deux, mais 10 000 ! Nous voulons sensibiliser les autorités, les instances publiques et la population guadeloupéenne. Il ne faut pas ignorer qu’il y a des associations sur le terrain qui mènent l’action. Je pense que la drépanocytose est nourrie dans un terrain fertile qui est l’ignorance, l’obscurantisme, le laxisme, l’immobilisme de certains, notamment des pouvoirs publics.
Que peut-on faire pour y remédier ?
Aujourd’hui, il faut qu’on se mette debout pour que la drépanocytose ne puisse plus tuer, car il n’est pas normal que la drépanocytose ne bénéficie pas de la même visibilité que les autres maladies génétiques. On l’a « racialisée », on a fait d’elle une maladie des pauvres et des noirs, donc les gens sont dans l’ignorance. Ce n’est pas une maladie propre aux noirs, car il y a des leucodermes qui en sont également atteints. La drépanocytose existe où il y a le paludisme, c’est la maladie la plus répandue au monde.
Pourquoi ce combat est aussi important pour vous ?
Je vais vous dire pourquoi c’est si important pour moi. Il y a 30 ans, la froideur et paradoxalement, la brutalité de l’annonce du diagnostic de la maladie de mon enfant Taylor a fait de moi un «lock». On m’a déclaré au téléphone, que mon fils n’atteindra pas l’âge de 5 ans. J’ai voulu faire mentir la science et cette personne que j’avais au bout du fil. Elles ont failli avoir raison, puisqu’à l’âge de 7 ans, mon fils a fait un arrêt cardiaque. J’étais avec lui à l’hôpital, il est mort dans mes bras, j’ai crié au secours personne n’entendait parce qu’ils étaient en train de prendre le café.
Quand j’ai réalisé qu’il est mort, j’ai crié et je me suis mise sur lui, après avoir fait tous les gestes techniques alors qu’il ne revenait pas à lui, je lui ai asséné un coup de poing sur la poitrine en lui disant : «Taylor, si tu meurs, je te tue !» et le coeur est reparti, je suis tombée sur les fesses. Je venais de donner la vie une seconde fois à mon enfant. Je me revendique, «lionne» puisqu’une lionne ne laisse pas n’importe qui prendre son enfant.
Comment êtes-vous arrivée à être ambassadrice de la drépanocytose ?
J’ai tout mis de côté pour m’occuper de la drépanocytose, ma carrière professionnelle, mes entreprises. J’ai parcouru 114 pays, pour aller me former, comprendre la maladie et aller porter l’information. Son pire ennemi c’est l’ignorance et surtout la honte de dire qu’on a un enfant malade. Alors je voulais casser tous ces tabous. Elle a détruit une bonne partie de ma famille, la drépanocytose a déjà trop tué.

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